Interview - John C. Aldrin

15 Novembre 2016

 

John C. Aldrin, de Computational Tools, a accepté de partager avec nous sa vision de la simulation et du futur des CND.

 

John C. Aldrin
 

Vous travaillez chez Computational Tools. Pouvez-vous nous expliquer ce que vous faites exactement ?

Depuis que je suis sorti de la Northwestern University en 2001, j’ai fait du consulting en ingénierie dans le domaine des essais non-destructifs, chez Computational Tools. J’ai toujours été intéressé par la transition de la recherche scientifique et des nouvelles technologies aux applications pratiques. La plupart de mon travail a été concentré sur la transition de technologies avec l’U.S. Air Force Research Laboratory. Ce processus de transition de technologie est souvent appelé la "vallée de la mort" dans la communauté R&D, à cause de la difficulté inhérente à la tâche. Des techniques prometteuses en laboratoire peuvent souvent être mises en échec une fois confrontées à la complexité des inspections réelles et aux considérations économiques. Mon travail a été centré sur l’application de méthodes de calcul visant à aider la transition de la technologie CND. Cela inclue la modélisation et la simulation CND, les outils d’analyse de données CND, les méthodes inverses de caractérisation de défaut, et l’évaluation de fiabilité CND.

 

Comment avez-vous commence à utiliser la simulation en CND ?

Lorsque je travaillais sur mon doctorat à la Northwestern University, le Professeur Achenbach et les étudiants et post-docs m’ont permis de profiter d’une excellente initiation à une grande variété de méthodes analytiques et numériques qui peuvent être utilisées pour étudier les END ultrasonores. A l’époque, je devais écrire mon propre code de méthode des éléments finis de frontière (BEM) comprenant une interface utilisateur, pour l’inspection ultrasonore de joints structurels d’avions. C’est là que j’ai découvert à la fois le grand intérêt de l’utilisation de la simulation de CND pour apporter une meilleure vision d’un problème d’inspection, et à quel point il est difficile de développer un logiciel de simulation de CND de qualité. Faire fonctionner un logiciel de qualité comme CIVA UT est une tâche titanesque.

 

De quelle manière la simulation peut-elle aider l’innovation dans les CND ?

Il y a tellement d’opportunités pour l’utilisation de la simulation CND d’améliorer les processus de développement de techniques CND. Premièrement, les modèles sont très utiles pour aider à l’interprétation de données de mesures brutes pour des problèmes d’inspection complexes. De même, les paramètres clés de toute technique d’inspection incluant une optimisation du capteur ultrasonore peuvent grandement bénéficier d’études paramétriques utilisant des modèles de mesures précis. C’est l’une des grandes fonctionnalités apportées par CIVA, dans laquelle chaque paramètre du modèle peut être soumis à une variation dans une étude paramétrique. Cela permet à l’utilisateur de s’épargner beaucoup de travail répétitif. Les modèles peuvent également être utilisés dans le cadre de CND avancés. Pour le développement de techniques d’inspection utilisant des classifications automatisées, les modèles sont utiles pour élargir les jeux de données expérimentales. Cela engendre potentiellement une réduction de coûts d’échantillonnage et améliore la fiabilité, s’ils sont utilisés correctement. Une autre approche émergente est l’utilisation de modèles directement dans les classifications de données par des méthodes inverses. Au cours du processus de validation de la technique, la méthodologie de probabilité de détection assistée par modélisation (MAPOD) peut évaluer la fiabilité d’une technique CND à moindre coût par rapport aux études POD conventionnelles. Enfin, lors d’une transition vers une nouvelle technique, la simulation de CND peut être très bénéfique en démontrant une compréhension fondamentale du problème d’inspection aux sponsors du projet, et également utile au cours de l’instruction des inspecteurs.

 

En tant que premier utilisateur de CIVA FIDEL 2D, quels retours pouvez-vous nous apporter sur cet outil ?

Selon moi, CIVA FIDEL 2D est un excellent ajout à l’ensemble de logiciels CIVA. Dans certaines circonstances, la version de base de CIVA UT rencontre de grandes difficultés lorsqu’elle tente de gérer toutes les nombreuses réflexions, transmissions et conversions de mode d’ondes se propageant dans un empilement composite multicouches. En remplaçant ce modèle de dispersion semi-analytique par un maillage différentiel finit numérique, il est possible d’obtenir des simulations précises du champ de dispersion en un temps raisonnable. Cela a été très utile pour étudier l’inspection ultrasonore de certains scénarios impliquant des dommages dans des composites.

Une fonctionnalité très utile qui sera je pense appréciée par la plupart des utilisateurs de CIVA est la possibilité de voir le champ de dispersion à tout instant dans cette zone quadrillée. Cela va bien au-delà de la possibilité de voir le rayon dans la pièce, il est également possible de voir les détails des ondes dispersées par un défaut, et même d’en créer une vidéo. Cette fonctionnalité peut grandement simplifier l’examen des données du B-Scan simulé et la détermination de l’origine de chaque signal. Enfin, comme il s’agit d’un modèle numérique complet du champ de dispersion, des caractéristiques telles que les ondes de surface et la diffraction d’angle sont mieux gérées. Même si ces simulations sont numériques et légèrement plus lentes qu’un calcul typique de CIVA UT, comme le domaine est limité à 2D, la plupart des simulations de B-Scan que j’ai lancées jusqu’ici ont été terminées en moins d’une heure, ou au pire d’une nuit.

 

Quelles améliorations du logiciel espérez-vous voir implémentées ?

Les améliorations qui m’intéresseraient vont peut-être être atypiques. Par exemple, j’aimerais énormément pouvoir travailler avec des résultats de CIVA dans Matlab sans avoir à exporter ces résultats dans des fichiers texte, ou pouvoir contrôler le nombre de cœurs que CIVA utilise pour un calcul (de manière à pouvoir utiliser l’ordinateur pour d’autres choses pendant la simulation). A long terme, j’aimerais énormément pouvoir importer des représentations de défaut plus complexes à la fois dans CIVA UT et dans CIVA FIDEL 2D. Mais la plupart de mes requêtes sont, je pense, plutôt mineures. CIVA a fait beaucoup de chemin au cours des presque 10 ans que j’ai passés à l’utiliser. Je voudrais dire "Merci beaucoup !" * aux équipes de développement pour les efforts gigantesques qui ont été mis dans ce logiciel.

* NDT : En français dans le texte.

 

Quel est, selon vous, le défi principal pour les entreprises de CND dans les années à venir ?

Je suppose que les forces du marché et la pression des coûts sont le principal défi pour les entreprises de CND dans les années à venir, surtout compte tenu des changements en cours en matière de production d’énergie, tels que dans les domaines pétrolier et nucléaire. Maintenant, si je considère plutôt les défis principaux pour les outils informatiques en CND à ce jour, je pense qu’il y a une grande opportunité de mieux tirer avantage des données numériques CND dont la collecte est en perpétuelle augmentation. Le défi est désormais de dépasser les CND traditionnels (les décisions de type "accepté" / "rejeté") et d’extraire des informations plus utiles pour soutenir des programmes de "maintenance basée sur la condition", et potentiellement impacter également les contrôles de processus en production, et éventuellement les décisions de design. Ouvrir la porte à ces possibilités serait une opportunité significative pour les CND, qui apporteraient une plus grande valeur ajoutée à nos clients et encourageraient une utilisation à long terme.