Interview - Loïc de Roumilly

14 Mai 2012


M. Loic De Roumilly, Chef de Groupe Ultrasons et Techniques Automatisées chez EDF, a aimablement accepté de répondre à quelques questions de notre part.

 

Loïc de Roumilly

 

Quel est votre poste au sein d'EDF ? Depuis combien de temps exercez-vous ?

Je travaille chez EDF depuis 3 ans, comme Chef de Groupe Ultrasons et Techniques Automatisées, au sein d'un service d’ingénierie en Examens Non Destructifs. Comme trois autres équipes de tailles équivalentes, la mission de mon groupe constitué d'une dizaine de personnes est de développer, ou de faire développer par des partenaires industriels, des procédés d'END et de les présenter à une Commission d'Experts afin d’en obtenir la qualification ; ces procédés qualifiés sont destinés à être déployés sur le parc nucléaire en fonctionnement ou sur le futur EPR de Flamanville.

 

Depuis quand utilisez-vous le logiciel CIVA ? (Comment avez-vous connu le logiciel ?)

Avant de rejoindre EDF, j'ai travaillé neuf ans au CEA-Saclay au sein du service de CND. C'est donc dès mon arrivée dans le Laboratoire des Méthodes de Contrôle en septembre 2000 que j'ai commencé à utiliser le logiciel CIVA (alors en version 5), et c'est par la simulation sur ce logiciel que j'ai fait mes premier pas en CND, avant de me confronter quelques mois plus tard à la réalité expérimentale. J'ai eu la chance de côtoyer de près les modélisateurs, qui m'ont permis à la fois de m'approprier les modèles du logiciel et en même temps la physique des ultrasons.
J'ai utilisé le logiciel CIVA pour évaluer les performances de procédés industriels de CND et, dans le cadre de ces études, j'ai été amené à comparer la simulation et l'expérience sur des fonctionnalités courantes comme sur des modèles plus élaborés, dès leur développement. Ensuite, dans le cadre de partenariats industriels (liés à la plateforme GERIM), j'ai été amené à rédiger des spécifications pour des fonctionnalités avancées et à évaluer les outils développés.

 

Quels sont les apports de CIVA dans votre activité ?

Le recours à la simulation dans l'activité de qualification de procédés est très fréquent, que ce soit dans mon groupe, au sein du service de qualification, ou chez nos partenaires industriels : en amont, pour la faisabilité et la conception d'un procédé, durant sa phase de développement, mais également à l'occasion de son déploiement sur site.
Plus précisément, dans le cadre de la faisabilité, de la conception ou du développement, CIVA permet de quantifier l'impact de paramètres influents liés à la géométrie du composant (voire à son atténuation), aux traducteurs, aux défauts, et, pour les qualifications dites "conventionnelles", d'évaluer les performances en sensibilité du procédé, c’est-à-dire de déterminer la taille d'un réflecteur de forme choisie détectable au niveau du seuil de notation. La simulation permet de limiter considérablement le nombre d'essais (et le nombre de maquettes et de défauts artificiels associés). Ainsi, les dossiers de qualification en ultrasons s'appuient en grande partie sur la simulation ; pour autant, nous tâchons de confirmer localement nos simulations par des essais expérimentaux.
Les étapes de développement en vue de la qualification aboutissent à une fiche de performances ; certaines sont accompagnées d'illustrations de performances ; ces illustrations peuvent être réalisées sur maquettes ; d'autres, dans de nombreux dossiers, sont obtenues par simulation sous CIVA.
Enfin, lorsqu'un procédé se trouve en situation d'expertise, par exemple lorsqu'il est mis en œuvre hors du périmètre qualifié, l'expert EDF peut recourir à la simulation CIVA pour compléter et conforter son analyse avant d'émettre son avis.
Par ailleurs, en amont et en concertation avec le CEA, EDF mène des développements, et les capitalise dans la plateforme logicielle CIVA : le module ATHENA de calcul par éléments finis, prochainement disponible à dans la version commerciale de CIVA, en est un exemple.

 

Recommanderiez-vous le logiciel à d'autres utilisateurs ?

Bien sûr. Il est difficile de se passer de la simulation aujourd'hui et le recours à CIVA, compte tenu de la variété des configurations traitées et des outils qu'il propose, ne peut qu'être encouragé. Pour autant, la simulation – et d'ailleurs quelque soit le logiciel employé – doit être accompagnée de bon sens, physique et critique : l'apport de la simulation est d'autant plus riche que l'on sait précisément ce que l'on en attend.

 

Quelles, sont selon, vous les pistes d'amélioration à creuser pour rendre CIVA plus conforme aux exigences du secteur industriel ?

Si le logiciel CIVA répond à un grand nombre de configurations, l'enjeu de la simulation dans le domaine de la qualification de procédés est de fournir des éléments fiables. Le logiciel est éprouvé depuis plusieurs années par l'utilisation qui en est faite dans de nombreux secteurs industriels, mais les travaux de validation déjà engagés sont à encourager, pour permettre aux utilisateurs de mieux cerner les domaines de validité des modèles qu'ils exploitent.
Par ailleurs, dans l'optique de simuler au plus proche la réalité, des pistes pourraient être approfondies pour permettre aux utilisateurs de paramétrer leurs configurations encore plus facilement, et de manière plus intuitive, plus proche de la pratique expérimentale.
Mais c'est tout un art que de rendre intuitif un outil, tout en maintenant le niveau de technicité requis permettant de traiter des configurations canoniques comme des cas subtils d'expertises.